25 ans de prison pour Vladimir Kara-Murza : une « justice » stalinienne

25 ans de prison pour Vladimir Kara-Murza : une « justice » stalinienne

Mémorial France s’associe au Centre de défense des droits Humains Memorial pour condamner le verdict prononcé aujourd’hui contre Vladimir Kara-Murza et demander sa libération immédiate et inconditionnelle.


Jeudi 17 avril 2022, le tribunal municipal de Moscou a prononcé une sentence scandaleuse à l’encontre de Vladimir Kara Murza. Le juge a décidé d’appliquer la peine requise par le procureur général une semaine plus tôt : 25 ans de détention.

Ce verdict illégal et criminel n’est pas le premier en Russie contemporaine, mais dans le contexte actuel, il se distingue comme une démonstration criante de l’absence totale de l’Etat de droit dans la Fédération et de l’usage de la loi comme instrument cruel de vengeance politique.  

La vie de Vladimir Kara Murza se confond avec la trajectoire naturelle d’un journaliste talentueux, honnête et courageux en Russie : intérêt pour le mouvement de libération russe (rappelons son film sur les dissidents soviétiques: » ils ont choisi la liberté »), implication politique au sein de l’aile démocratique en collaboration étroite avec Boris Nemtsov, entrée en militantisme des droits humains, lutte pour les droits et la défense des prisonniers politiques, désir enfin de poursuivre les organisateurs et complices de la répression politique. C’est pour ce dernier point- la promotion de la liste Magnitsky, que Vladimir Kara Murza a fait l’objet d’une interdiction d’exercer sa profession de journaliste, puis d’une tentative d’assassinat, et maintenant d’une peine de prison d’une longueur inconcevable. 

L’appareil répressif n’a pas cherché à dissimuler le fait que les poursuites engagées contre Vladimir Kara Murza étaient uniquement et exclusivement motivées par ses activités en faveur des droits humains, par sa position anti-guerre et par sa lutte pour la démocratie en Russie.Ces trois « crimes » résument une activité publique normale, légale et ouverte qui ne consistait qu’à dénoncer les crimes des autorités russes, Vladimir Kara Murza n’a commis aucun autre crime, aucun acte violent.

Il a été condamné pour avoir dénoncé la guerre, pour avoir aidé et attiré l’attention du monde sur le sort des prisonniers politiques, évitant que les tragédies humaines deviennent de simples statistiques. Il a été puni car il a exigé et obtenu que les auteurs d’actes contraires à la loi en Russie rendent enfin des comptes.  

Il est révélateur que la participation de Vladimir Kara Murza aux activités d’une « organisation indésirable » fut l’organisation d’une table ronde en défense des prisonniers politiques en Russie avec le centre des droits de l’homme de Memorial.

Être condamné par le juge Sergei Podoprigorov n’est pas non plus une coïncidence. Il y a dix ans, ce fut Kara Murza qui obtint l’inscription du nom de Podoprigorov sur la liste Magnitsky. Mais ce nom ne sera pas oublié, pas plus que celui du procureur Loktionov. Ce dernier a récemment requis une peine de 24 ans de prison pour le journaliste Ivan Safronov et aujourd’hui, l’équivalent d’un quart de siècle pour Kara Murza.

Deux des arrières grands pères de Kara Murza ont été fusillés à l’époque de Staline, son grand père est passé par les camps. La sentence de 25 ans est « stalinienne », le passé revient en Russie. Pourtant une telle longueur de peines n’était plus applicable en URSS après la réforme pénale de 1958, le code pénal ne prévoyait pas de peines supérieures à 15 ans, la peine de mort existait alors mais elle fut abolie en 1996 dans la Fédération de Russie. 

Aujourd’hui, la Russie pratique systématiquement l’assassinat politique (pensons à Boris Nemtsov, proche de Vladimir Kara Murza, assassiné en 2015), l’empoisonnement de personnalités de l’opposition. Des agents des autorités russes ont déjà tenté par deux fois en 2015 et 2017 d’empoisonner Vladimir Kara Murza. La décision brutale d’aujourd’hui en constitue la suite. 

Les autorités se vengent de Vladimir Kara-Murza pour les services constants et désintéressés qu’il a rendus au peuple russe, pour avoir réussi à traduire en justice les violateurs réguliers des droits de l’homme.

La famille de Vladimir Kara-Murza – sa femme Yevgeniya et leurs trois enfants – l’attendent sans fléchir.

Nous exprimons notre soutien total à Vladimir Kara-Murza et exigeons sa libération immédiate et inconditionnelle.

Liberté pour les prisonniers politiques !


Le Conseil du Centre de défense des droits humains de Memorial

source : https://memorialcenter.org/news/25-let-zaklyucheniya-vladimiru-kara-murze-stalinskoe-pravosudie