Memorial International & le Centre des Droits humains “Memorial” liquidés ? Et après ?

Memorial International & le Centre des Droits humains “Memorial” liquidés ? Et après ?

Que signifient les jugements de liquidation des 28 & 29 décembre dernier ?

Les ONG Memorial International et le Centre des droits humains “Memorial” ont toutes deux fait l’objet, en décembre dernier, d’une décision de mise en liquidation judiciaire. Mais les deux jugements ne sont pas encore exécutoires, les deux ONG, comme leur y autorise la loi, ont décidé de faire appel.


Quels sont les délais et quand ces jugements vont-ils avoir force de loi ?

Le jugement concernant Memorial International a été rendu par la Cour suprême de Russie le 28 décembre 2021.
L’ONG peut interjeter appel de cette décision dans un délai d’un mois à compter de la date du jugement, dont au plus tard le 27 janvier 2022.

La Cour suprême fixera ensuite la date de l’audience en appel.

La Cour suprême étant la plus haute juridiction de l’édifice judiciaire de la Fédération de Russie. Cet appel est donc la dernière voie de recours possible.

La décision prononcée après examen de l’appel, quelle qu’elle soit, aura donc force de loi.

Pour le Centre des droits humains “Memorial”, c’est la cour d’appel de juridiction générale qui est compétente.
Ici, le délai est fixé à un mois à compter de la signification de la décision motivée. l’ONG l’a reçu officiellement le 13 janvier. Le recours en appel doit donc être déposé au plus tard le 12 février.

Le Tribunal Municipal de Moscou fixera ensuite la date de l’audience en appel.

La décision d’appel pourra ensuite faire éventuellement l’objet d’un pourvoi en cassation (suspensif, en principe), puis d’une éventuel recours devant la Cour Suprême.

Pour le Centre des droits humains “Memorial”, ce n’est donc vraisemblablement que le début d’un long processus judiciaire.

Au cours de ces audiences, les juridictions auront l’opportunité d’annuler les décisions de première instance, mais il est vraisemblable que les décisions de liquidation seront maintenues.

Pour le moment, les deux organisations poursuivent leurs activités, à la fois pour organiser au mieux leur défense, mais surtout pour ne pas interrompre leurs programmes. Par ailleurs, elles réfléchissent aux moyens de les prolonger à l’avenir sous une autre forme en cas de décision de liquidation définitive.


Que contiennent les jugements de première instance ?

Dans leurs jugements, les deux juridictions ont motivé leur décision de mise en liquidation par le non-respect répété des dispositions de la loi sur les « agents de l’étranger », plus précisément l’absence de marquage obligatoire sur certaines publications ou la non-conformité des mentions obligatoires. quand bien même y aurait-il eu absence ou défaut de marquage sur certaines publications (ce que Memorial conteste), prononcer la liquidations des deux ONG pour cela est complètement disproportionné.


Mais la Cour européenne des droits de l’homme n’a-t-elle pas exigé d’ interrompre le processus de liquidation ?

C’est exact ! La Cour européenne des droits de l’homme a invoqué l’article 39 de la Convention — d’habitude on ne l’utilise que lorsque quelqu’un est menacé de mort ou d’aggravation sérieuse de sa santé — et a exigé de la Russie qu’elle suspende la liquidation de Memorial, jusqu’à ce que la plainte concernant la loi sur les « agents de l’étranger », déposée en 2013 auprès de la CEDH par Memorial et d’autres ONG russes, soit examinée. D’après l’article 39, la Russie n’a pas le droit de liquider Memorial avant qu’une décision soit prise concernant cette loi qui sert de base juridique aux demandes de liquidation du parquet. Mais il faut aussi rappeler que, utilisant ce même article 39, la CEDH a exigé, par exemple, qu’Alexeï Navalny soit libéré, mais Navalny n’a pas été libéré…


Ce qui veut dire que malgré tout ils liquideront Memorial ?

Il semble bien qu’après l’examen de tous les pourvois et recours, en appel sera entamer les processus de liquidation. Mais pour des organisations importantes comme le Centre des droits humains “Memorial”  et Memorial International, ce processus n’est pas rapide et prendra un certain temps.


Et maintenant ?

Actuellement le Centre des droits humains “Memorial”  et Memorial International poursuivent leur activité actuelle. Si vous êtes à Moscou, allez voir leurs expositions, participez à leurs visites guidées, utilisez leurs bases de données, suivez leur actualité et leurs publications – en un mot restez Memorial !
Comme auparavant, les juristes du le Centre des droits humains “Memorial”  déposent des recours auprès de la Cour européenne des droits de l’homme, prend en compte les demande d’assistance juridique venant de citoyens, en particulier dans le cadre de son travail sur le Nord-Caucase et avec les migrants ; et malheureusement ses équipes continuent à tenir les listes de prisonniers politiques.


Et après ?

Pour le cas où les décisions de liquidation deviendraient effectives, diverses options permettant de poursuivre l’action de Memorial sont à l’étude. Mais techniquement, à partir de ce moment-là, le processus de liquidation devra commencer. Même s’ il reste encore la possibilité, d’une part d’une décision favorable en appel et d’autre part d’une suite heureuse à la décision de la Cour européenne sur l’application de mesures de garantie dans le cadre de l’Article 39.

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