La chercheuse biélorusse Tatiana Kouzina arbitrairement détenue au Bélarus
Le 28 juin 2021, vers 22 heures, la chercheuse biélorusse Tatiana Kouzina a été arrêtée à l’aéroport de Minsk alors qu’elle partait pour une courte mission à Tbilissi, en Géorgie. Durant plusieurs heures, ses proches ont été dans l’ignorance de son sort. Le lendemain matin, le juge d’instruction en charge de son dossier a informé sa famille que Tatiana était poursuivie dans le cadre d’une enquête criminelle et placée en détention d’abord pour 72 heures, puis pour 10 jours. Les charges retenues contre elle sont à ce jour inconnues, son avocat contraint par une clause de non-divulgation n’étant pas en mesure de les communiquer même à sa famille.
Titulaire d’un Master en sciences politiques de l’Université européenne des sciences humaines de Vilnius, Tatiana Kouzina est une chercheuse et experte biélorusse reconnue dans le domaine de la société civile, de la participation civique et de l’administration publique. Elle est co-fondatrice, enseignante et chercheuse à l’École des jeunes cadres en administration publique (SYMPA) et à l’Institut biélorusse pour la réforme et la transformation de l’administration publique (BIPART). Depuis près d’une dizaine d’années, SYMPA offre des formations dans le domaine de l’administration publique aux jeunes Biélorusses, fonctionnaires, militants civiques, hommes d’affaires, journalistes, contribuant ainsi à édifier des passerelles entre les administrations d’Etat et la société civile. Avec ses collègues de SYMPA, Mme Kouzina a publié de nombreux textes académiques et d’orientation des politiques publiques, notamment dans le cadre du projet de recherche international EU-STRAT dont SYMPA a été partenaire entre 2016 et 2019, aux côtés de grandes universités européennes, y compris l’Université libre de Berlin et l’Université de Leiden aux Pays-Bas.
De 2010 à 2015, Tatiana Kouzina a rempli les fonctions de directrice exécutive de l’Institut biélorusse d’études stratégiques (BISS). Elle a aussi travaillé entre 1996 et 2009 à l’Université européenne des sciences humaines (EHU) à Minsk, puis à Vilnius, après la fermeture forcée de l’EHU en 2004 et sa relocalisation en Lituanie. Mme Kouzina a notamment occupé le poste de vice-doyenne au département franco-biélorusse des sciences politiques et administratives, puis de responsable du service des relations publiques au sein dudit établissement. À ce titre, elle a beaucoup contribué au développement de la communauté universitaire biélorusse
L’arrestation arbitraire de Tatiana Kouzina s’inscrit dans la continuité des politiques répressives tous azimuts mises en œuvre par les autorités biélorusses. C’est la communauté des chercheurs et des experts indépendants qui se trouve cette fois-ci dans la ligne de mire du régime. Quelques jours seulement avant l’arrestation de Mme Tatiana Kouzina, l’analyste politique biélorusse Artiom Shraibman, de même que l’économiste Sergueï Chaly, ont été contraints de quitter le pays sous la menace d’arrestation. Le 30 juin, Valeria Kostyugova, politiste biélorusse, responsable du projet « Notre opinion » (« Наше мнение« ) a été elle aussi arbitrairement arrêtée.
Mémorial France condamne fermement ces attaques du régime contre les milieux de la recherche et de l’expertise indépendante biélorusse et appelle à la libération immédiate de Tatiana Kouzina et de Valeria Kostyugova, ainsi que de toutes les personnes arbitrairement détenues au Bélarus.